Eurovision. L’Ukraine impose
sa voix à la Russie
Publié le
13/05/2016 - 17:44
La chanteuse ukrainienne Djamala, samedi 14 mai à
Stockholm, après sa victoire à l’Eurovision. PHOTO MAJA SUSLIN/AFP
La candidate
ukrainienne Djamala a été couronnée samedi 14 mai à Stockholm grâce au vote du
public pour sa chanson “1944“. Sergueï Lazarev, le candidat russe, finit
troisième. Toute la semaine, les bookmakers relayés par la presse russe, en
avaient fait les grands favoris de l’édition 2016.
[Article
initialement publié vendredi 13 mai]
Comme chaque
année, l’Eurovision est un événement important en Russie. La presse russe a
suivi de près le déroulement des épreuves éliminatoires de la compétition, dont
la finale aura lieu samedi 14 mai à Stockholm. Selon le quotidien Moskovski
komsomolets, les boomakers ont placé parmi les favoris le
chanteur représentant la Russie, Sergueï Lazarev.
Mais il aura
fort à faire avec la candidate de l’Ukraine, Djamala, très bien cotée
également. Au point que le tabloïd a titré : “L’Eurovision devient un
champ de bataille entre la Russie et l’Ukraine”. Une chose est sûre, le
duel ne s’exprimera pas dans la langue nationale de chacun, les deux artistes
ayant choisi de chanter en anglais, avec un peu de tatar pour la chanteuse
ukrainienne.
Pour le reste, difficile de trouver plus opposées que ces deux prestations. Sergueï Lazarev accompagne sa chanson You’re the only one, déjà un tube en Russie, d’un numéro visuel et acrobatique jugé spectaculaire, tandis la brune Djamala, avec 1944, à la mémoire des Tatars de Crimée déportés par Staline cette année-là, installe avec sa voix profonde une atmosphère de recueillement qui tranche nettement sur l’ensemble des numéros.
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La chanteuse, déjà confirmée, est le fruit de ce brassage interethnique hérité de l’Union soviétique : fille d’une mère ukraino-arménienne et d’un père tatar de Crimée, tous deux déportés au Kirghizstan, elle a grandi, comme elle le raconte dans un long entretien à Moskovski komsomolets, “au milieu de différentes cultures et religions”. “Mes parents m’ont appris à respecter toutes les traditions”, dit-elle.
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C’est pourquoi Djamala “regrette” que sa chanson soit perçue comme une provocation envers la Russie [qui a annexé la Crimée en 2014] : “Ma chanson n’est pas un reproche, c’est une complainte. Je ne comprends pas qu’elle puisse offenser qui que ce soit ou susciter de la haine”. Début mars, le vice-président de la commission de la politique des médias à la Douma, Vadim Denguine, avait exprimé le souhait que les organisateurs de l’Eurovision fassent barrage à la chanteuse, le règlement du concours bannissant tout message politique.
Ces derniers ce sont contentés d’une recommandation à l’Ukraine : s’abstenir de toute déclaration politique avant et pendant la compétition. Cependant, d’autres nations d’ex-URSS qualifiées pour la finale sont actuellement en conflit.
C’est ainsi
que la chanteuse représentant l’Arménie, Iveta Moukoutchian, très remarquée
également avec sa chanson Lovewave, n’a pas hésité à déployer, à
l’issue de la demi-finale, un drapeau du Haut-Karabakh, cette république
autoproclamée disputée depuis 25 ans par l’Arménie et l’Azerbaïdjan, et où un
nouveau conflit armé a éclaté debut avril. Le drapeau, représentant un pays non
reconnu par l’ONU, est désormais interdit, en vertu du nouveau règlement du concours.
Laurence
Habay
Source : Courrier International
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